Gérard Collomb, ancien maire de Lyon et ex-ministre de l’Intérieur est mort à l’âge de 76 ans, ce samedi 25 novembre 2023.
L’ex-sénateur et président du Grand Lyon est décédé des suites d’un cancer de l’estomac qu’il avait publiquement annoncé en septembre 2022.
L’annonce a été publiée par nos confrères de Lyon Mag ce samedi soir. Des sources politiques confirment à actu Lyon ce samedi soir la triste nouvelle.
Pris en charge à l’hôpital de Lyon Sud
Sa femme, Caroline Collomb, a confirmé le décès de son mari. « Il a souhaité lorsqu’il est devenu évident que sa maladie ne pourrait être améliorée par un quelconque traitement anticancéreux, bénéficier d’une sédation profonde qui lui a permis de s’éteindre paisiblement auprès des siens », a-t-elle écrit vers 21h à l’AFP.
Son état de santé s’était considérablement dégradé ces derniers jours et il avait été pris en charge par le service d’oncologie de l’hôpital de Lyon Sud à Saint-Genis Laval. Son décès est intervenu « au cours d’une courte période de coma », selon son épouse.
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Figure politique de Lyon
Lyon perd une figure politique qui a profondément transformé la métropole et la troisième ville de France, la plaçant dans le rang des grandes cités européennes.
Gérard Collomb a aussi occupé de nombreuses fonctions et mandats, de député à sénateur, maire de Lyon et président du Grand Lyon ou encore ministre de l’Intérieur d’Emmanuel Macron.
Cet animal politique entre au conseil municipal de Lyon en 1977 pour son premier mandat de conseiller municipal. Il est à l’époque membre du Parti socialiste.
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Conquête patiente de la ville
Élu en 2001 à la mairie de Lyon après un quart de siècle dans l’opposition, Gérard Collomb a conquis la capitale des Gaules après plusieurs échecs. Le socialiste, déjà critiqué pour ses positions iconoclastes au PS à l’époque, prend la mairie de Lyon par défaut. Il devient maire contre Michel Mercier (UDF) et Charles Millon (DLC), avec 10 000 voix de moins qu’eux.
Initiatrice de la « gauche plurielle », sa liste remporte trois arrondissements aux élections municipales de 1995. Il est élu maire du 9e arrondissement de Lyon qui devient son fief, et qu’il transforme de Vaise à La Duchère et intègre l’exécutif du Grand Lyon, présidé par Raymond Barre. C’est depuis sa mairie d’arrondissement que Gérard Collomb se taille un nom et une image.
Triomphe de 2008 et de 2014
Le nouveau maire de Lyon se représente aux municipales de 2008 qu’il gagne haut la main. L’élu remporte le scrutin dès le premier tour et rafle six arrondissements sur neuf. Après le fruit d’une campagne avec une gauche unie tout en s’adressant aussi à des électeurs du centre et de la droite, Gérard Collomb prouve qu’il est capable de parler « à tous les Lyonnais ».
« Je rencontre chaque jour des Lyonnais qui me disent : à la présidentielle, j’ai voté pour Sarkozy, mais pour les municipales vous pouvez compter sur moi », confiait alors le candidat… de gauche.
En 2014, il gagne de nouveau la mairie en arrivant en tête du premier tour et s’offre un troisième (et dernier mandat municipal). Mais une première ombre au tableau apparaît : la socialiste Nathalie Perrin-Gilbert devenue frondeuse remporte le 1er arrondissement. Six ans plus tard, l’élue a rejoint l’écologiste Grégory Doucet et obtient le prestigieux portefeuille de la culture.
Vélo’v, Confluence, berges du Rhône…
Gérard Collomb qui s’est revendiqué lui-même « maire bâtisseur » est à l’origine de plusieurs grands chantiers durant ses 17 années de mandat à la Ville ou à la Métropole. Le maire fait un joli coup en devenant l’un des premiers élus de France à croire aux vélos en libre-service.
En 2005, Lyon s’inspire de ce qui a été mis en place à La Rochelle dans les années 1970. Elle propose un service de vélos en libre-service, fourni par l’entreprise JCDecaux. Les Lyonnais adoptent rapidement les Vélo’v avant Paris et ses célèbres Véli’b.
Autre projet d’envergure qui a permis de conforter son triomphe de 2008 : le réaménagement des berges du Rhône. Cet ancien parking devient un espace de promenade végétalisé qui réconcilie les habitants de Lyon avec leur fleuve. Pistes cyclables, jeux pour enfants, péniches, bars et restaurant font renaître le cheminement entre Gerland et le parc de la Tête d’or.
L’un des plus grands projets de M. Collomb est sans conteste la renaissance de la Confluence, derrière les voûtes de Perrache.
À l’époque, les Lyonnais rejettent cette partie de la ville entre Rhône et Saône où se côtoient une prison, un marché de gros, des industries et des activités de prostitution. Collomb fait le pari d’y créer un nouveau quartier moderne sur une idée de Raymond Barre. Les plus grands architectes mondiaux y signent des bâtiments, les cubes vert et orange, un centre commercial, des logements, une darse, un cinéma, des bureaux et le Musée des Confluences, dont la facture s’envole.
« Un maire entrepreneur »
L’un des coups de génie de Gérard Collomb, diront certains, ou affairisme ou clientélisme pointent ses adversaires, est d’avoir entretenu des liens très étroits avec le monde économique.
« Gérard Collomb s’est appuyé sur sa culture historique pour se placer au cœur de l’identité locale. Il a réalisé la synthèse des trois lieux de pouvoir, gage d’efficacité politique. Il est un maire entrepreneur, résume Paul Boino, professeur d’urbanisme à l’université Lumière Lyon-II, seul le développement économique créateur d’emplois et générateur de ressources fiscales permet de faire autre chose ».
Franc-maçon revendiqué, le socialiste chouchoute les grands patrons, les entrepreneurs, les promoteurs et les acteurs du tourisme. Il n’oublie pas de maintenir des liens avec l’archevêché du haut de la colline de Fourvière pour obtenir le soutien de puissants réseaux catholiques.
Cette vision lui permet de modeler la métropole à son image : la Fête des Lumières devient un grand spectacle touristique connu dans le monde entier, l’OL et Jean-Michel Aulas obtiennent dans la douleur la possibilité de construire le Grand Stade des Lumières avant l’Euro-2016.
Gérard Collomb multiplie aussi les quartiers de bureaux, à Gerland où les géants mondiaux de la santé s’installent, à Vaise, à Vaulx-en-Velin La Soie ou à Confluence. La Part-Dieu devient l’une de ses priorités où il veut multiplier les tours. Le maire veut créer une « skyline lyonnaise ».
Un succès économique qui s’est retourné contre son auteur. Pas assez d’arbres, trop de béton auront raison de l’ambition de Gérard Collomb.
Entre « colères » et « autoritarisme » au « royaume Collomb »
Derrière les succès, le baron local règne en maître sur son royaume à force de succès électoraux et économiques. Il obtient aussi la création d’une métropole du Grand Lyon aux compétences XXL en captant les compétences du département du Rhône.
Le personnage est aussi connu pour ses colères, ses coups de griffe et son amour du pouvoir.
Le maire de Lyon peut quitter une interview avec un journaliste un peu trop pointu, boycotte des médias locaux qui « sortent des affaires » sur sa pratique du pouvoir et peut tourner la page d’une longue amitié politique en cas d’opposition.
« Colérique », « autoritaire », « clanique », « déconnecté », « dur »… Les adjectifs ne manquent pas pour décrire sa face sombre. Au fil du temps, ses pratiques et ses amitiés avec de grands patrons lyonnais lui sont reprochées, y compris par ses plus proches.
De Aulas à Olivier Ginon, un très proche des grands patrons
Le maire de Lyon aide au développement de GL Events, fondé par son ami Olivier Ginon, du promoteur Cardinal mené par Jean-Christophe Larose ou l’entreprise de jeux vidéos Infogrames de son ami Bruno Bonnell.
Ces trois hommes vont devenir des incontournables de la galaxie Collomb et remportent d’importants projets à Lyon, d’immeubles à construire à Confluence ou pour le géant de l’événementiel GL Events la gestion des principales salles et lieux de congrès de la ville.
Gérard Collomb est aussi très proche de Jean-Michel Aulas, président de l’OL, qu’il soutient largement dans ses grands projets.
Il défend la construction du Grand Stade à Décines malgré des critiques et des oppositions allant jusqu’à valider le financement d’un tram, le T7, aujourd’hui toujours peu fréquenté, desservant le stade. Comme rarement le fait un élu local, il plaide même pour un changement de législation et fait pression sur le gouvernement de l’époque pour obtenir « son » stade.
Le père politique d’Emmanuel Macron
En 2016, Gérard Collomb est l’un des premiers à croire au destin politique d’Emmanuel Macron qu’il imagine même comme possible successeur à Lyon. Mais l’ex-banquier d’affaires vise le trône suprême un an plus tard. Le « super-maire » de Lyon se projette à travers son cadet.
Pour Luc Rosenzweig, journaliste au Monde et à Libération, Lyon sous la direction de Gérard Collomb a été, par son alliance de la social-démocratie avec le monde de l’entreprise, « un laboratoire du macronisme avant même que le dénommé Macron songe à entrer par la grande porte dans l’arène politique ».
Ministre de l’Intérieur avant le divorce avec Macron
Un an plus tard, Emmanuel Macron entre à l’Élysée et fait de Gérard Collomb le numéro 2 du gouvernement, en le nommant ministre de l’Intérieur. C’est le début des ennuis et du toboggan pour Gérard Collomb.
En devenant premier flic de France, il accepte à contrecœur de quitter Lyon et doit jongler avec les crises, un projet de loi d’immigration très critiqué à gauche tout en revenant quasi tous les week-ends dans sa ville.
Après un an et quatre mois place Beauvau, le ministre qui a toujours gardé un œil sur Lyon claque la porte du gouvernement, ouvrant une crise politique, et échappe de peu au mouvement des Gilets jaunes, mais pas à l’affaire Benalla.
Après coup, il explique son départ à cause de désaccords sur la politique migratoire et des divergences de vues avec Emmanuel Macron qu’il critique de plus en plus ouvertement. Mais en réalité, il sait que sa reconquête de Lyon s’annonce difficile pour les municipales et métropolitaines de 2020.
Retour chaotique à Lyon
Un retour dans la capitale des Gaules qui fut chaotique. Pendant son CDD au ministère de l’Intérieur, il pense que ses deux hommes de confiance, Georges Képénékian maire par intérim et David Kimelfeld au Grand Lyon vont lui dérouler le tapis rouge. Mais ce dernier ne cède pas son siège à Gérard Collomb à la métropole et une longue guerre s’ouvre entre les deux hommes.
Le 5 novembre 2018, Collomb redevient maire de Lyon lors d’un conseil municipal qui fait office de formalité. L’année suivante est marquée par l’attentat de la rue Victor Hugo et l’ouverture d’une enquête judiciaire visant l’élu pour des soupçons de détournement de fonds publics.
Mais le plus dur commence : se projeter aux élections municipales de 2020 où la Macronie se fracture comme jamais offrant un boulevard aux écologistes et à la gauche.
La chute de 2020 face à la vague verte
Après de multiples attaques et coups bas (la direction de la fédération LREM du Rhône par son épouse Caroline est aussi très contestée), Gérard Collomb obtient finalement le soutien du parti LREM aux élections métropolitaines tandis que David Kimelfeld s’engage en candidat dissident. Les deux listes arrivent quasi à égalité, mais sont devancées par l’écologiste Bruno Bernard.
À la mairie, le candidat soutenu par Gérard Collomb Yann Cucherat est largement devancé par un inconnu de la vie politique : Grégory Doucet. Pour tenter de faire barrage aux écologistes au second tour, l’ancien baron tente une ultime alliance avec la droite de Laurent Wauquiez, donnant le tournis aux électeurs lyonnais.
C’est finalement une vague verte qui déferle sur Lyon. Le candidat écologiste l’emporte largement, humiliant politiquement Gérard Collomb, obligé de se retirer. Battu, l’ancien ministre explique sa défaite par le Covid, son départ à Paris et les divisions entre macronistes.
« J’ai creusé ma tombe en modernisant Lyon »
Il assure aussi qu’en ayant transformé Lyon, il a lui-même « creusé (sa) tombe » en attirant de jeunes cadres qui votent bien plus à gauche. Gérard Collomb a surtout payé sa légèreté sur les sujets environnementaux et son usure du pouvoir dans une ville à la population changeante.
Après sa déroute, il n’a cessé d’attaquer les Verts en les accusant de vouloir « tuer » Lyon et son attractivité économique. Dans une interview qu’il accorde à actu Lyon en juin 2022, il attaque le maire écologiste sur tous les sujets.
Interrogé sur ses ambitions pour 2026, il n’excluait pas de retenter sa chance malgré son âge. Mais la maladie en a décidé autrement et Gérard Collomb a dû se consacrer à sa santé. Le pape de la politique lyonnaise s’est peu à peu retiré de la vie publique. Il n’assistait plus au conseil municipal et se contentait de livrer des conseils en coulisses.
En février 2022, il recevait des mains d’Emmanuel Macron les insignes de la Légion d’honneur malgré les froides relations entre les deux hommes.
Samedi soir après l’annonce de son décès, Emmanuel Macron a rendu hommage à son ancien compagnon de route. « Il fut le digne successeur d’Edouard Herriot », a écrit le chef de l’Etat. « Les Lyonnais sont orphelins et je partage leur chagrin ». Dans son communiqué l’Elysée assure que le chef de l’Etat et son épouse Brigitte Macron, avec laquelle il partageait une relation proche, « perdent un ami cher ».
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